... et des problèmes éthiques qu’il soulève1.
Le cas de Vincent Lambert dont il a été question dans la presse ces derniers jours soulève un certain nombre de questions qui devraient mobiliser notre attention critique et notre réflexion. Alors que le médecin en charge de V. Lambert, le docteur Kariger, et son équipe, avaient jugé bon, conformément à la loi Léonetti, de procéder à un arrêt des traitements, le tribunal administratif, convoqué à la demande de ses parents, s’est prononcé, le jeudi 16-01-2014 contre la décision du médecin. Le démenti apporté par les magistrats aux arguments invoqués par le médecin de Vincent Lambert et son équipe, après qu’ait été respectée la procédure collégiale, nous interpelle ; c’est, en effet, la première fois qu’un tribunal se prononce sur le fond d’une décision médicale relative à l’arrêt de traitement dans le cadre d’une application de la loi Léonetti. Cette décision suscite des interrogations sur les rapports entre la justice et la médecine et sur la compétence de chacun à décider de ce qu’il convient de faire dans le respect de la dignité du malade ; elle nous interpelle aussi sur les conditions d’application de la loi à des situations toujours singulières. « Que faire pour bien faire ? », telle est l’une des questions qui nourrit la réflexion éthique ; elle est ici on ne peut plus d’actualité. Avant de tirer la conclusion d’une insuffisance de la loi et de la nécessité ou de la rectifier, de la compléter, d’en proposer une autre, il nous semble plus utile et plus pertinent de mobiliser nos capacités de réflexion pour examiner la situation et, relever les questions qu’elle soulève, les réponses données à ces questions, les problèmes qui en résultent, les enjeux et les solutions éventuelles possibles. Nous ne prétendons pas donner ici un avis mais plutôt apporter notre modeste contribution à une réflexion éthique sur un sujet qui nous concerne tous et dont nous devrions sans doute nous préoccuper.
I. La situation de Vincent Lambert
Vincent Lambert a été hospitalisé à la suite d’un accident de moto en 2008. Il est actuellement au CHU de Reims, tétraplégique, dans un état « pauci relationnel » ou « de conscience minimale » consolidé et irréversible : il ne peut ni parler, ni communiquer d’aucune façon ; seules quelques manifestations musculaires sont observables. Il est alimenté et hydraté artificiellement, ce qui lui permet d’être maintenu en vie « artificiellement ». Cet état n’exclut pas une certaine forme ou niveau de conscience mais très difficile à apprécier.
Vincent Lambert n’avait pas rédigé de directives anticipées ni choisi une personne de confiance pour le représenter pour le cas où il ne serait plus à même d’exprimer clairement sa volonté.
Le Dr Kariger en charge de Vincent Lambert en accord avec l’équipe soignante, après avoir appliqué la procédure collégiale comme l’impose la loi Léonetti, et consulté les membres de la famille, a décidé l’arrêt de l’alimentation et de l’hydratation artificielles, jugeant que le maintien de ces traitements relevait de « l’obstination déraisonnable ». Cette décision paraissait d’autant plus justifiée que non seulement des signes de souffrance avaient pu être aperçus dans les réactions organiques de Vincent, mais aussi des « comportements d’opposition aux soins, faisant suspecter un refus de vivre ».
Faute de pouvoir se référer à des « directives anticipées » et à la personne de confiance, conformément à la loi, le Dr K. a consulté les proches de Vincent Lambert sur ce qu’il aurait pu dire concernant la décision à prendre pour le cas où il se serait trouvé dans une situation de fin de vie.
Les proches de Vincent Lambert, dont sa femme qui est infirmière et connaît bien, comme lui-même, ces situations de fin de vie, ont affirmé que Vincent Lambert leur avait déclaré ne pas vouloir vivre dans une telle situation.
« Vincent était infirmier, dit un de ses neveux ; il a dit à sa femme, à son frère, qu’il connaissait ce genre de cas. Il nous a dit que s’il était dans le coma comme ça, sans aucune vie, il préférerait mourir ».2
Compte tenu des arguments invoqués à l’appui de la décision médicale, celle ci semble justifiée, en application de la loi et la décision du tribunal paraît d’autant plus étonnante. De ce fait un certain nombre de questions se posent.
II. Les questions
Cette situation entre-t-elle dans le cadre de la loi Léonetti ? Cette loi est présentée sous le titre : « Loi….relative aux droits des malades et à la fin de vie ». Or d’après le tribunal, V. Lambert n’est pas malade, il n’est pas non plus en fin de vie (V .L. est dans un état stable et non dans un processus dégénératif dont l’issue serait la mort) et son traitement ne relève donc pas de « l’obstination déraisonnable ».3
A supposer, comme le pense Monsieur Léonetti, à qui la question a été posée, que la situation de Vincent Lambert relève bien de la loi de 2005 (ce qui paraît incontestable dans la mesure où il s’agit d’une « loi relative aux doits des malades » s’inscrivant dans la suite logique de la loi de 2002) est-on dans le cas d’une « obstination déraisonnable » telle qu’elle est précisée dans le premier article de la loi ?. Pas vraiment selon le tribunal.
Que dit cet article de loi : « Ces actes ne doivent pas être poursuivis par une obstination déraisonnable. Lorsqu’ils apparaissent inutiles, disproportionnés ou n’ayant d’autre effet que le seul maintien artificiel de la vie, ils peuvent être suspendus ou ne pas être entrepris. Dans ce cas, le médecin sauvegarde la dignité du mourant et assure la qualité de sa vie … ». Du point de vue du tribunal « l’alimentation et l’hydratation artificielle n’ont pas pour objet de maintenir artificiellement la vie puisque l’état de conscience minimale dans lequel se trouve Vincent Lambert implique la persistance d’une perception émotionnelle et l’existence de possibles réactions à son environnement ».4
Ce qui est en jeu ici c’est donc le troisième critère ; à ce sujet P. Verspieren déclare5: « Je pense qu’il est regrettable que le législateur ait précisé les critères de l’obstination déraisonnable. La réalité est trop complexe pour être enfermée dans trois formules. On voit bien ce que veut dire inutile et disproportionné ; le troisième critère est beaucoup moins clair »…et il ajoute : « la seule question à se poser, au cas par cas , est de savoir si l’alimentation est adaptée ou pas à la situation du patient ».
La procédure collégiale a-t-elle été suivie ? Le tribunal ne semble pas le contester et le Dr Kariger a bien consulté la famille comme l’exige la loi. Toutefois la mère de Vincent Lambert, qui a fait appel auprès du tribunal administratif de la décision médicale d’arrêt de traitement, regrette qu’elle n’ait pas été mieux informée (ce que reconnaît le Dr Kariger) et qu’elle n’ait pas été consultée pour la décision. A ce sujet il faut toutefois rappeler que si les proches doivent être informés et s’il est bon (et conforme à la loi) qu’ils participent à la réflexion sur la situation, il n’est pas souhaitable de leur faire porter la responsabilité du choix ; celle-ci appartient de droit au médecin.
Demeurent alors deux questions :
1. Est-on ici dans la situation d’une personne « en phase avancée d’une affection grave et incurable » et pour laquelle le traitement artificiel (à la condition que l’on considère ici l’alimentation et l’hydratation artificielles comme un traitement) leur permettant de vivre, est cause d’une « souffrance qui ne peut être soulagée » qu’en arrêtant ce traitement ?
A supposer que Vincent Lambert soit « en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable », ce que conteste déjà le tribunal, éprouve t-il une souffrance ? Cette souffrance est-elle causée par le traitement ? Cette souffrance ne peut-elle être soulagée qu’à la condition d’arrêter le traitement ?
La réponse à ces questions fait problème selon le tribunal. Notamment le tribunal conteste la pertinence des interprétations données par le médecin aux observations qu’il a faites et en fonction desquelles il a conclu à la souffrance de Vincent Lambert. Le tribunal relève que cette interprétation ne comporte aucune certitude.
2. Si un doute peut peser sur ce qui précède il ne reste alors, pour décider légalement et légitimement de l’arrêt du traitement que la référence au « consentement libre et éclairé » de Vincent Lambert ; or comme nous l’avons précisé, Vincent Lambert est dans l’incapacité d’exprimer son jugement et de faire un choix ; en outre il n’a pas rédigé de « directives anticipées » ni choisi de « personne de confiance ». Enfin la famille est divisée sur le choix qui conviendrait le mieux et la décision à prendre. Certains de ses proches (sa femme, ses neveux…) prétendent l’avoir entendu dire que dans une telle situation il préférerait mourir. Cela suffit-il pour justifier l’arrêt du traitement ? Ses parents et leur avocat ne le pensent pas; ils invoquent alors un autre argument : la décision d’arrêt de traitement remet en question ici un autre droit fondamental qui est « le droit de vivre». Ce droit s’imposerait d’autant plus ici que Vincent Lambert « n’est pas malade mais handicapé » et n’est pas en fin de vie puisque son état est stabilisé et qu’il lui reste une certaine forme de conscience.
Se trouvent alors mis en tension ici deux droits fondamentaux : « Le droit à la vie » et « le droit à la liberté » sur lequel se fonde le droit de décider de sa vie et de sa mort, notamment dans la situation que nous examinons ici.
Comme on le voit alors, l’interrogation sur le choix réel de Vincent Lambert est bien le nœud du problème et la divergence familiale et la situation de conflit qui en résulte, sont ici des éléments centraux. Ce sont cette divergence et ce conflit familial qui sont à l’origine de la démarche auprès du tribunal. Ils ont eu aussi pour effet d’introduire un doute sur la justification de la décision médicale et peut-être aussi sur la bonne foi des autres témoignages concernant la volonté de Vincent Lambert.
Comme on peut le penser ces questions et les réponses données ne vont pas sans poser quelques problèmes.
III. Les problèmes et les leçons à tirer
En premier lieu on peut s’interroger sur la compétence du tribunal à se prononcer ainsi sur le fond d’une décision médicale et les conséquences d’une telle intervention.
Ce qui est en question ici ce n’est pas, contrairement à ce que pourraient penser certains, la loi elle-même mais l’interprétation de la loi relativement à son application dans une situation singulière. Sur ce point on notera qu’aucune loi ne pourra, à elle seule, permettre d’éviter toutes les difficultés que l’on peut rencontrer dans des situations comme celle-ci. Une loi est, en effet, nécessairement générale et les situations cliniques toujours singulières.
Mais ce qui est en jeu ici aussi c’est la compétence des médecins à bien interpréter les signes de souffrance ou de refus de traitement chez ce malade en état « pauci relationnel ». Si le médecin qui est auprès du malade et le suit régulièrement, éclairé par les avis et constatations de ses divers collègues, n’est pas le mieux placé, tribunal est-il quant-à lui mieux placé pour le faire ? Emettre ici un doute n’est-ce pas introduire une certaine défiance qui pourrait nuire à une bonne pratique du soin ?
Enfin admettre que le tribunal administratif puisse être ainsi sollicité pour donner un avis sur le fond d’une décision médicale, n’est-ce pas ouvrir la porte à une judiciarisation toujours plus grande de la pratique médicale ? Auquel cas la tendance chez les médecins ne sera-t-elle pas de poursuivre les traitements en fin de vie par peur de se voir condamnés par une décision du tribunal?
Mais ces problèmes ne se seraient pas posés s’il n’y avait pas eu, d’une part, le conflit familial et si, d’autre part, on avait disposé de l’expression de la volonté de Vincent Lambert.
Trouver une solution heureuse au conflit familial et tendre ainsi vers un consensus n’est pas chose facile dans des situations où chacun est fortement affecté par la situation et ses enjeux.
De plus il faut bien comprendre que le plus souvent ce sont des « mondes » différents qui se rencontrent, qui ont souvent pour repères des valeurs différentes, une interprétation ou encore une hiérarchisation différentes des mêmes valeurs ; communiquer n’est pas seulement informer ; bien communiquer c’est construire avec l’autre un sens commun et s’en assurer. Cela rend nécessaire un travail d’intercompréhension qui nécessite attention à l’autre, écoute active et participative, respect de l’autre dans son altérité ; ceci implique la recherche d’une juste distance entre proximité et éloignement excessifs. Nous saisissons ici l’occasion de souligner l’importance d’une bonne communication avec la famille. Bien souvent les difficultés rencontrées relativement aux décisions médicales viennent d’une incompréhension de part et d’autre ; il importe donc de se donner, si possible, le temps de l’échange, de l’écoute pour éviter que chacun se retranche sur des convictions qui risquent toujours de rendre aveugles ou insensibles aux bons arguments. Construire des jeux de langage communs permettant une intercompréhension nécessite efforts, attention, écoute active et participative.
Quant à la volonté de la personne sur sa fin de vie il faut qu’elle soit exprimée et il faut souligner ici l’importance des directives anticipées (même si leur rédaction et leur interprétation peut poser problème en certaines circonstances) et de la personne de confiance ; encore faut-il préciser que la personne de confiance a pour fonction, non de donner son avis personnel, mais de représenter le malade et plus précisément d’être son porte-parole, d’exprimer sa volonté.
Mais les analyses qui précèdent nous montrent aussi l’intérêt qu’il y a à bien mener une réflexion éthique sur les décisions à prendre dans de telles situations, et en application de la loi. Sans doute cette réflexion a-t-elle eu lieu ici ; mais les objections formulées par le tribunal ont-elles été anticipées ? S’est-on posé toutes les bonnes questions ? A-t-on pris assez de distance critique pour interroger les différents points de vue, faire émerger les présupposés, révéler et examiner les convictions en jeu, intégrer à la discussion « rationnelle », argumentée , les considérations sur le Droit (participation par exemple d’un juriste formé à la pratique de la réflexion éthique) : a-t-on pris le temps nécessaire pour mener une telle réflexion ?
Enfin, dans une situation où toutes les personnes concernées sont, le plus souvent, en souffrance, pour des raisons personnelles différentes, ne faudrait-il pas, écouter cette souffrance, lui donner l’occasion de s’exprimer, de se faire entendre avant que ne soient engagées des démarches auprès d’un tribunal ?
IV. Faudrait-il changer la loi ? En proposer une autre ?
Sur ces questions il importe de se montrer prudent au sens où l’entendait le philosophe Aristote qui faisait de la juste et lucide délibération la vertu des vertus.
Il faut rappeler d’abord que toute loi étant générale, aucune loi ne permettra à elle seule une juste adaptation à la situation singulière ; il y aura donc toujours une part d’interprétation dans l’application de la loi au cas.
Ceci dit, avant une éventuelle révision de la loi, il importerait de la faire mieux connaître et de souligner à cette occasion, l’intérêt qu’il peut y avoir, pour chacun, à faire connaître sa volonté concernant sa fin de vie et à écrire ses directives anticipées.
Il resterait, cependant, encore, la question de leur rédaction et de leur interprétation en situation ; de telles directives sont, en effet, écrites par des personnes en parfaite santé qui ignorent la situation dans laquelle ils se trouveront et ce que sera leur état physiologique et psychique dans cette situation. En outre, peut se poser aussi un problème si ces directives n’ont pas été renouvelées ou confirmées récemment. S’il y a, alors, une personne de confiance devra-t-on considérer que sa parole, révélant une récente confidence du sujet concerné l’emportera sur ses directives anticipées plus anciennes ?
On devrait enfin prêter beaucoup plus d’attention qu’on ne le fait souvent au sens précis des mots et expressions que nous utilisons dans les commentaires. Ainsi il a été souvent dit que l’arrêt de traitement dont il est question ici serait assimilable à une « euthanasie passive ». L’euthanasie est toujours un acte et cet acte qui consiste à mettre un terme volontairement et sciemment à la vie d’un malade, transgressant de ce fait un interdit majeur, l’interdit de tuer, est interdit dans la loi Léonetti. On ne peut donc admettre, sauf à choisir l’ambiguïté et la confusion plutôt que la clarté, la distinction et la précision, que l’arrêt de traitement serait, comme on le dit quelquefois, assimilable à une euthanasie (même passive). Une telle confusion risque d’entretenir l’idée que « l’euthanasie passive » étant déjà légalisée par la loi Léonetti, on pourrait, sans autre précaution, passer de l’autorisation de « l’euthanasie passive » à l’euthanasie « tout court » ! A vouloir affaiblir les distinctions on ne fait qu’entretenir la confusion. Une telle façon de faire n’est pas à la hauteur de l’enjeu !
En Conclusion
Les situations complexes et difficiles comme celles de Vincent Lambert ne sont pas aussi exceptionnelles que l’on pourrait le penser, même si chacune n‘en demeure pas moins singulière. Les progrès de la médecine, son efficacité, sa capacité à maintenir en vie des patients en dépit de pathologies très lourdes, ont permis d’ajouter des années à la vie mais en même temps les fins de vie sont devenues plus problématiques. Bien souvent et de plus en plus souvent l’on se trouve en présence de situations pour lesquelles on s’interroge : est-ce bien raisonnable de poursuivre les traitements ?
La loi Léonetti est une bonne loi (malheureusement pas assez connue); non parce qu’elle permet de résoudre tous les problèmes par sa simple application aux situations, mais parce qu’elle a su trouver un juste équilibre entre les droits des malades et les droits et devoirs des médecins ; elle s’inscrit à la suite des lois de 2002 dans cette recherche d’une relation équilibrée entre malade et médecin alors que, nous le savons bien, toute relation d’aide et de soin est asymétrique. Sans doute cet équilibre est-il fragile et il ne suffit pas qu’il soit présent dans la loi pour qu’il le soit dans les faits.
Elle a aussi pour vertu de se donner comme finalité la dignité du malade et le refus de toute obstination déraisonnable ; le droit du malade de refuser tout traitement va dans ce sens.
Elle exige enfin pour sa bonne application la pratique du dialogue avec les malades, les familles mais aussi entre les membres d’une équipe de soins ; c’est à cette condition qu’elle pourra s’appliquer au mieux aux situations singulières de fin de vie dans le respect des personnes. C’est, en effet, par le moyen d’une discussion rationnelle, d’un dialogue respectueux des personnes, que l’on pourra se donner des raisons de penser que la décision qui sera prise se rapprochera le plus de ce qui est, sinon le mieux, du moins le moins mauvais. C’est ce dialogue qui se pratique dans une réflexion éthique menée, relativement aux problèmes rencontrés dans des situations cliniques complexes, analogues à celle dont il a été question ici.
Penser que l’on pourrait, par un ensemble de normes, circonscrire les pratiques de façon à éliminer ou restreindre le plus possible le champ de l’incertitude, c’est là quelque chose à la fois d’illusoire et de dangereux ; le risque serait grand, en effet, en multipliant les normes, de rendre impossible toute bonne pratique du soin et de faire perdre sa dimension proprement humaine à une pratique qui relève pour une bonne part d’un art.
Reste alors peut-être à améliorer la loi ! A souligner davantage l’importance à accorder aux directives anticipées, à la désignation d’une personne de confiance et à le rappeler à l’occasion de toute admission en institution de soin. Un des obstacles majeurs est sans doute ici la crainte que nous avons de parler de la mort. Faire connaître la loi, notamment auprès des jeunes, l’expliquer, développer les soins palliatifs, bien former les personnels, les sensibiliser à l’approche des questions éthiques et à la réflexion éthique, devraient faire l’objet de notre préoccupation première.
On ne dira jamais assez combien une telle réflexion éthique, si elle est bien menée, si elle intègre toutes les personnes concernées par la situation, peut être précieuse dans de telles situations pour prendre de la distance critique, pour interroger les points de vue, apaiser les oppositions, réaliser un travail de coopération et favoriser une alliance thérapeutique permettant de respecter au mieux la dignité de la personne et en premier lieu celle du patient.
Ceci dit, il nous faut enfin admettre qu’on ne pourra éviter les incertitudes, c’est là simplement une conséquence de notre commune humanité ; c’est aussi ce qui nous impose attention, vigilance et prudence dans nos jugements ; mais aussi sollicitude et solidarité à l’égard des plus vulnérables. Par delà tout le travail de rationalisation tant recherché aujourd’hui, c’est la recherche du plus raisonnable qui devrait importer le plus.
Pour l’Espace de Réflexion Ethique de Saint Brieuc
J.C.Sacchi6
[1] Il s’agit ici de proposer ce texte comme un document de travail pour la réflexion éthique.
[2] Journal Libération du 16-01- 2014
[3] Cf. A ce sujet le compte rendu du tribunal.
[4] Id.
[5] Documents de l’hebdomadaire La Vie
[6] Merci au Dr Christophe Charasse pour la relecture critique de ce texte et ses conseils.
Documents consultés :
« Loi du 25 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie », Legifrance.gouv.fr
Journal Libération du 17-01-2014
Journal La Croix du 17-01-2014
Journal Ouest-France des 17 et 18-01-2014
Documents de l’hebdomadaire La Vie consultés sur le site de La Vie le 17-01-2014
Affaire de Reims, « Vers un retour de l’acharnement thérapeutique », Société Française d’Accompagnement et de Soins Palliatifs, janvier 2014, article de son président, Vincent Morel.
Compte rendu de l’audience du Tribunal Administratif de Chalons-En-Champagne N° 1400029